Essayons de comprendre quelque chose
Voici un petit lexique des nouvelles structures pour s'y retrouver.
Collegium : Les collegiums ont été créés au sein de l'UFC en 2015 dans le but de regrouper les différents acteurs de chacun des cinq domaines suivants : "Sciences fondamentales et sciences de l'ingénieur", "Sciences de la nature, environnement et territoire", "Sciences juridiques, économiques et de gestion", "Sciences de l'homme et humanités", "Sciences de la santé du sport". Chacun de ces cinq collegiums participe à la réflexion sur la stratégie de l'UFC dans son domaine (formations, recherche, ouverture, valorisation....) et pilote notamment la campagne des postes. Nous reviendrons sur la composition de leur conseil dans la suite et des inquiétudes qu'elle peut susciter.
ISITE (Initiative Science Innovation Territoire Economie) : Projet porté par la COMUE UBFC lauréat de la deuxième vague des Projets d'Investissements d'Avenir (PIA 2). Trois axes majeurs ont été mis en avant dans le projet ISITE : "Matériaux avancés, ondes et systèmes intelligents", "Territoires, Environnement, Aliments" et "Soins individualisés et intégrés". Le coût total de projet sur quatre ans s'élève à 99M€, dont 31M€ venant du PIA 2 et 68M€ assurés par le consortium (=membres de l'UBFC + ENSAM de Cluny + Organismes de recherche + Etablissements hospitalo-universitaires de la région).
RITM-BFC (Réussir Innover Transformer Mobiliser en Bourgogne Franche-Comté) : Projet porté par la COMUE lauréat du PIA 3 "Nouveaux cursus à l'université" qui se concentre sur la réussite des étudiants en 1er cycle et sur la formation continue. Le projet dure sur 10 ans et 13,3M€ ont été demandés.
Pôle UBFC : Plus ou moins l'équivalent des collegiums à l'échelle de la COMUE.
Vive l'entre-soi !
La loi sur l'autonomie des universités a accru les pouvoirs décisionnaires du président. La création des collegiums en est un bel exemple. En effet, sous couvert de "stratégie", "cohérence", "valorisation", la présidence a créé des structures contournant les conseils élus de l'université.
Regardons la composition des conseils des collegiums : directeurs des unités de recherche, assesseurs aux études, directeurs des structures fédératives de recherche, responsables de département, directeurs des écoles doctorales, et sont invités permanents les directeurs de composante et responsables des service administratifs. En plus de ce beau petit monde, quelques étudiants, eux élus. Nous déplorions déjà la concentration des pouvoirs entre les mains d'une poignée de personnes. Les collegiums accroient considérablement cette dérive.
A la tête de chaque collegium, on retrouve un président, élu par le conseil du collegium en question, mais détail important, qui doit plaire au président de l'UFC. En effet, un simple avis défavorable motivé du président de l'UFC suffit à la tenue d'une nouvelle élection.
Les collegiums, structures en charge notamment de la campagne de postes au sein de l'université, permettent donc de contourner les conseils d'UFR où les membres sont élus et beaucoup plus représentatifs de la diversité des personnels de l'université.
La COMUE prend le pouvoir
Les moyens obtenus par la COMUE via les PIA ont clairement redistributé les cartes. Dernier exemple en date : les BQF (Bonus Qualité Formation) gérés par l'UFC ont été remplacés par des projets RITM-BFC pilotés par la COMUE. Il faut également savoir que 10% des postes vacants de tous les membres de l'UBFC sont redéployés vers les trois axes de l'ISITE. La COMUE devient logiquement l'interlocuteur privilégié de la région pour l'enseignement et la recherche et pour la sélection des projets et donc des financements.
Que va-t-il rester à l'UFC dans les années à venir ? Ou plutôt : Que va-t-il rester de l'UFC dans les années à venir ?
Nous sommes extrêmement inquiets par le manque d'information et de transparence des décisions prises par la COMUE. Il est très difficile de trouver des informations sur qui décide de quoi. La gouvernance est en complète deconnexion du terrain et des personnels des composantes.
La COMUE sert également de laboratoire d'essai pour les réformes à venir. Les CDD sont légions, des postes d'enseignant-chercheurs de type "tenure-track" (période d'essai de 3 ans avec mission première de répondre aux appels à projet...) sont proposés. L'excellence rime donc avec précarité.
Concurrence, concurrence, concurrence, concurrence !!!
Tout d'abord, il faut voir que de plus en en plus d'appels à projet sont fléchés. Il vaut donc mieux avoir des projets ISITE compatibles pour espérer faire son travail de chercheur dans des bonnes conditions à l'UFC. 75% des moyens alloués aux actions "recherche" de l'ISITE sont pour les trois axes thématiques. Il est évident que les moyens mis dans ces appels à projet sont autant de moyens qui ne sont pas à disposition des laboratoires en tant que récurrent. L'équilibre et l'indépendence de la recherche sont clairement remises en question. Le président de la COMUE s'inquiète lui-même des moyens mis à disposition des sciences humaines et sociales suite aux résultats du dernier appel Région.
Ce mode de financement par projets semble de plus inefficient. En effet, il mobilise les enseignants-chercheurs pour répondre aux appels mais également pour siéger dans les commissions d'évaluation. Avec ce millefeuille administratif, un même projet peut passer devant trois ou quatre commissions. Le personnel de l'université est une fois de plus détourné de ses missions premières.
Pourquoi ces appels à projet ne sont jamais remis en cause et sont même accentués ?
L'hypothèse la plus probable est qu'ils instaurent la mise en concurrence des chercheurs et des laboratoires, dans une logique libérale qui prépare à la fin du statut d'enseignant-chercheur. L'individualisation des financements prépare à l'individualisation des carrières et des rémunérations. Le "bon" enseignant-chercheur sera valorisé et le "mauvais" montré du doigt. "Bon" et "mauvais" selon s'il rentre bien dans les cases décidées par le gouvernement. Les discussions actuelles avec le ministère vont clairement dans ce sens.
Résistance !
Ce millefeuille illisible ne peut pas durer. Il renforce clairement le manque de démocratie au sein de l'université en confiant le pouvoir à une poignée de personnes, en mettant à mal la représentatitivé de tous les personnels et éloignant encore plus les décisions de ses composantes. Il nous faudra être vigilant sur la prise en compte de ceux qui, quotidiennement, maintiennent l'université à flot et devraient avoir leur mot à dire. Les personnels de l'université doivent être entendus sur ces décisions qui vont impacter en premier lieu leurs conditions de travail.
Nous devons dès maintenant nous convaincre et convaincre autour de nous qu'une autre université est possible.