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L’arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence doit être appliqué à la rentrée 2019. Or, le niveau d’impréparation de l’Université atteint un seuil critique, plaçant les personnels, aussi bien enseignants que non-enseignants, dans des situations inquiétantes à trois mois de la rentrée. Personne ne semble avoir pris la mesure des changements à opérer au sein des formations de licence depuis l’été dernier. Tout se fait dans la précipitation et le chaos à la dernière minute. L’Université ne donne aucune directive, les UFR n’en font pas plus, mais les formations sont censées s’organiser et remonter des calendriers impossibles à produire étant donné les questions en suspens concernant cet arrêté.

Par cet arrêté, le ministère a détruit des fonctionnements éprouvés et connus de tous, fruit d’années de concertations, de négociations et de compromis, sans les remplacer par un autre système. Le texte ne fait que poser des objectifs ambitieux mais inatteignables au vu des moyens actuels des universités. Le désastre à venir est aggravé par la différence d’intention, le ministère appliquant sa recette libérale autoritaire permettant de mettre les formations en concurrence, les universités se pensant encore au temps pré-LRU où le ministère organisait tout et donnait des directives. Au passage, il enlève des droits aux étudiants (deuxième session, anonymat aux examens, semaine de révision, compensation à l’année) et fait porter la responsabilité de l’échec sur leur comportement individuel plutôt que sur la défaillance organisée du service public.

De là, l’Université n’a que deux choix possibles : soit donner des directives claires et communes à l’ensemble des formations ; soit laisser les formations s’organiser à leur niveau en autonomie (laissant la porte ouverte à l’arbitraire pour les étudiants). Dans un cas comme dans l’autre, il y a urgence pour que la préparation de la rentrée puisse se faire sereinement.

Voici quelques questions que nous soumettons à la sagacité de nos instances universitaires.

  1. Qu’est-ce que la deuxième chance ? L’arrêté propose deux modes de fonctionnement qui sont complètement contradictoires. D’un côté, une autonomie des formations passées en contrôle continu intégral, dans ce cas : Comment la mettre en place sans multiplier les évaluations vu l’état de saturation des enseignants (notamment dans les formations à gros effectifs) ? Comment s’assurer que les étudiants de formation différentes soient traités de manière équitable ? De l’autre, un mauvais remake de feu la deuxième session, dans ce cas : Quand et pour qui organiser cette deuxième chance ? Faut-il faire un jury avant de convoquer les étudiants en deuxième chance ? Doit-elle être dans la continuité de chaque semestre mettant une pression supplémentaire sur chaque fin de semestre ? Est-elle obligatoire ? Comment convoque-t-on les étudiants pour l’épreuve de deuxième chance ? Que se passe-t-il si un étudiant ne vient pas ? Comment organise-t-on matériellement cette deuxième chance en si peu de temps ? Quel est l’intérêt pédagogique de cette 2e chance précipitée ?
  2. Y a-t-il une hiérarchie entre semestre, bloc de connaissances et compétences, et unités d’enseignement, comme le laisse entendre l’article 9 ? Ou alors, un bloc de compétence peut-il s’étaler sur plusieurs semestres, auquel cas, quand valide-t-on les résultats du bloc en tenant compte de la compensation, et donc quand organise-t-on la deuxième chance pour les unités du bloc ?
  3. Comment se passe la progression des étudiants dans la formation, en particulier ceux qui vont échouer à valider un ou plusieurs blocs de compétences ? Seront-ils autorisés à continuer et, dans ce cas, à quelles conditions ? Va-t-on réellement favoriser les parcours personnalisés (et par conséquent la galère généralisée pour les personnels) ?
  4. Qui fait partie de la direction des études ? À quelle hauteur est valorisée cet investissement dans le cadre du référentiel ? Est-ce que cette direction des études vient remplacer les anciennes responsabilités de diplôme et année, ou vient-elle s’ajouter aux structures existantes ? Est-ce que les personnels administratifs peuvent faire partie de la direction des études ?
  5. L’Université a décidé d’ajouter la notion de note plancher à tout ce bazar. Vu l’expérience plus que mitigée acquise ces dernières années en master, est-ce vraiment une bonne idée ?
  6. Comment s’articule cette réforme avec la réforme du bac en cours ? Ne devrait-on pas réfléchir aux deux réformes en même temps plutôt que de devoir changer l’organisation des études chaque année pendant les trois prochaines années (voire plus…) ?

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